Guide du 3 avril 2019
Mars Films / Warner Bros. France / UGC Distribution

Ce qu’il faut voir cette semaine.

L’ÉVENEMENT

MON INCONNUE ★★★★☆
De Hugo Gélin

L’essentiel
Un sommet de comédie romantique inventive porté par un trio d’acteurs irrésistibles, François Civil, Joséphine Japy et Benjamin Lavernhe.

En 2019, le cinéma français aime s’aventurer sur des terrains où il s’est souvent interdit d’aller. Ces fameux films que soi-disant « on ne sait pas faire » ici : le film de sous-marin avec Le Chant du loupet la comédie romantique avec Mon inconnue, domaine a priori réservé des Anglo-Saxons. Hugo Gélin est un amoureux fou du genre. Cette passion aurait pu l’enfermer dans des références écrasantes et l’empêcher de développer un récit original. On sait vite qu’il n’en sera rien. Car la première réussite de Mon inconnuetient dans la mise en place de son récit et de ses personnages.
Thierry Chèze

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PREMIÈRE A ADORÉ

LA FLOR – PARTIE 4★★★★☆
De Mariano Llinás

Après plus de cent vingt ans d’existence, on pourrait croire avoir tout vu et tout entendu au cinéma. Penser, à entendre certains esprits chagrins, que tous les films ont été faits. Et que les créateurs sont donc désormais condamnés à se répéter avec plus ou moins de bonheur. Venu d’Argentine, La Flor met une claque vivifiante à ces idées reçues, aux tenants du « ce ne sera jamais mieux qu’avant », à ceux qui croient dur comme fer que le cinéma a définitivement rendu les armes et abandonné à la série toute velléité créative. C’est un projet fou, ne rentrant dans aucun cadre ou plutôt les fracassant pendant plus de treize heures.
Thierry Chèze

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L’HÉRITAGE DES 500 000 ★★★★☆
De Toshiro Mifune

Inédit en France, le seul et unique de l’acteur Toshiro Mifune débarque enfin dans nos salles. La star japonaise y incarne un militaire de formation forcé par des gangsters de retourner aux Philippines pour y déterrer le mythique “Or de Yamashita”, un trésor de guerre enfoui par l’ancien occupant japonais... Dans la lignée du Trésor de la Sierra Madreet anticipant la vague des “salopards” américaine, ce film d’aventures de 1963 brille par sa direction d’acteurs et par l’efficacité de sa narration. Pas étonnant lorsqu’on sait qu’Akira Kurosawa, le mentor de Mifune, a prêté ses techniciens et supervisé le montage... 
Christophe Narbonne

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PREMIÈRE A AIMÉ

SHAZAM !★★★☆☆
De David F. Sandberg

Il était permis d’avoir les plus gros doutes sur Shazam !vu sa promo qui promettait un mélange entre Deadpoolet Kick-Ass, à base de blagues mille fois recuites sur un ado capable de se transformer en superhéros au look nanar. La surprise est d’autant plus forte.
Sylvestre Picard

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LA LUTTE DES CLASSES ★★★☆☆
De Michel Leclerc

Pendant quarante-cinq minutes, on pense tenir le grand film de ce début d’année. Une comédie d’actu qui capte l’air du temps et sur laquelle flotte un parfum de réel entêtant, marié à des effets poétiques et un sens de l’observation suraigu. Comme toujours chez Leclerc, il y a cette incroyable capacité à mêler politique, autobiographie et douceur.
Gaël Golhen

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TERRA WILLY – PLANÈTE INCONNUE ★★★☆☆
De Éric Tosti

Embarqué avec ses parents à bord d’un vaisseau spatial, le petit Willy est brutalement éjecté de l’appareil en détresse suite à une pluie d’astéroïdes. Sa capsule de secours atterrit en catastrophe sur une planète inconnue dont il va découvrir les dangers et les attraits en compagnie de Buck, son robot de survie. Sur place, il se prend d’amitié pour une drôle de bestiole, entre le chien et le mille-pattes, qu’il surnomme Flash. L’équipe des As de la jungle (la série et le film) confirme son appétence pour les univers barrés et bariolés à travers cette histoire initiatique, bourrée de gags visuels et de répliques décalées. Indépendamment de l’intrigue, très classique (en attendant que ses parents le retrouvent, Will va faire l’expérience de la maturité), les trois inséparables auteurs – Éric Tosti, Jean-François Tosti et David Alaux – ont mis le paquet sur l’animation et le design du monde imaginaire et des personnages. Le robot Buck (auquel Édouard Baer prête merveilleusement sa voix désinvolte, même trafiquée) et la créature Flash sont en tout point attachants, tandis que les monstres-pierres qui menacent Willy apparaissent comme de spectaculaires créations visuelles, dignes des meilleurs bestiaires SF. Si cette maîtrise technique s’applique moins à l’animation des humains (l’éternel défi sur lequel butent tous les studios spécialisés), Terra Willy – Planète inconnuen’en reste pas moins exemplaire du savoir-faire français en la matière.  
Christophe Narbonne

COMME SI DE RIEN N’ÉTAIT
★★★☆☆
De Eva Trobisch

C’est l’histoire d’une femme bien dans sa peau et dans son corps. Une femme aimée et aimante, dont l’existence bascule tragiquement... sans qu’elle veuille l’admettre. Cette nuit où après un dîner entre anciens camarades de classe, l’un d’eux, aussi alcoolisé qu’elle, se fait un peu trop pressant et la viole. Pour elle, ça ne fait aucun doute : la vie doit continuer, même si elle se retrouve à croiser chaque jour son agresseur à son travail. Jusqu’à ce que le déni devienne intenable. Car plus elle cherche à reprendre le contrôle de sa vie, plus celle-ci lui échappe... Grand Prix du festival Premiers plans d’Angers, Comme si de rien n’étaitse vit sous tension permanente. On est dans la tête de cette femme étouffant d’une douleur et d’une haine impossibles à enfouir éternellement, campée par Aenne Schwarz, dont l’interprétation puissante et nuancée permet d’oublier quelques scories scénaristiques.
Thierry Chèze

CURIOSA 
★★★☆☆
De Lou Jeunet

En art, le terme « curiosa » désigne une représentation, écrite ou visuelle, érotique, voire pornographique. L’écrivain Pierre Louÿs (1870-1925), érotomane convaincu, en était adepte et réalisa notamment des photos de ce type. Certaines d’entre elles mirent en scène sa maîtresse, Marie de Régnier, fille du poète José-Maria de Heredia, avec laquelle Louÿs noua une passion dont Lou Jeunet fait le cœur battant de son premier film de cinéma, une ode à l’amour fou et à l’art comme source d’aliénation et de manipulation. Femme de lettres, libre penseuse et libertine, Marie de Régnier (1875-1963) est la véritable héroïne de ce Curiosaqui la montre tour à tour épanouie, blessée, victime puis maîtresse d’un destin marqué par une émancipation à la Colette – elle signa son premier livre, L’Inconstante, sous le pseudonyme de Gérard d’Houville. Noémie Merlant, dans son plus beau rôle depuis Le ciel attendra, lui prête sa beauté fragile et n’hésite pas à tomber le haut et le bas devant la caméra sensuelle de Lou Jeunet, qui, c’est assez rare pour être signalé dans un premier film français, est dans une recherche plastique constante. Jeu sur les cadres, les textures (de la peau, des étoffes, du mobilier...), le son, tout y passe, quitte à parfois tomber dans une préciosité à la Terence Davies (Chez les heureux du monde). On ne se plaindra pas de cette envie d’images et de beau qui fait cruellement défaut au cinéma hexagonal.
Christophe Narbonne

TEL-AVIV ON FIRE 
★★★☆☆
De Sameh Zoabi

Salam est un Palestinien de 30 ans qui vit toujours chez sa mère à Jérusalem. Un brin cossard, il s’est fait pistonner par son oncle comme stagiaire sur le tournage de LA série arabe à succès... dont il va devenir le scénariste. Mais chaque jour, pour se rendre sur le plateau à Ramallah, il doit franchir un check-point tenu par un officier israélien dont la famille – juive – ne rate aucun épisode de ce Plus belle la vielocal. Le militaire va faire pression sur Salam – en lui confisquant son passeport – pour qu’il modifie le récit en faisant la part plus belle aux personnages juifs. Aussi inventif  dans son écriture que dans sa réalisation, jouant avec les codes du soap, Sameh Zoabi use – sans en abuser – de l’humour pour raconter les relations complexes et tendues entre Juifs et Arabes. Et ainsi en souligner le côté si souvent absurde. Une comédie d’auteur réjouissante.
Thierry Chèze

LOS SILENCIOS
★★★☆☆
De Beatriz Seigner

Alors que la question des populations « déplacées » occupe une place centrale dans le débat politique, ce long métrage sud-américain apporte sa pertinente et singulière pierre à l’édifice. On y suit une Colombienne forcée de fuir avec ses enfants – mais sans son mari disparu – la guerre civile de son pays pour s’installer dans une petite île au milieu de l’Amazonie. La première partie de Los Silenciosraconte, tel un documentaire, le quotidien rugueux de cette nouvelle vie en exil forcé, les regards méfiants des autochtones... Puis, ce film qu’on croit longtemps purement réaliste s’aventure sur un terrain plus sensoriel, plus contemplatif en jouant avec l’allégorie du fantôme via le retour mystérieux de ce père prétendument mort. Le tout avec une fluidité qui ne rend jamais ce basculement artificiel et permet à la réalisatrice de faire rimer brillamment politique et poétique.
Thierry Chèze

 

PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIMÉ

J’VEUX DU SOLEIL ★★☆☆☆
De François Ruffin et Gilles Perret

Quatre ans après le carton Merci patron !son réalisateur François Ruffin a littéralement crevé l’écran. L’homme de 43 ans est devenu une figure médiatique et politique adepte du coup d’éclat. On se souvient peut-être de son maillot de foot porté à l’Assemblée Nationale. Devenu député rattaché à la France insoumise, il mène une croisade sans relâche contre le pouvoir en place devenant l’un des principaux poils à gratter de la macronie. Cela ne l’a pas empêché de s’être laissé surprendre par le mouvement dit des gilets jaunes.
Thomas Baurez

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CHAMBOULTOUT ★★☆☆☆
De Éric Lavaine

En 98, les Têtes raides sortaient un album qui annonçaient des lendemains qui chantent. Chamboultouplongeait le spectateur au cœur d’un drôle de paradoxe : mélanger musique populaire et délire arty (la langue précieuse et absconse) pour finalement tout laisser en ordre et... ne rien chambouler. C’est la même impression d’étrangeté qui domine devant le Chamboultout (avec un t cette fois-ci) d’Éric Lavaine. Ça commence comme une « dramédie ». Un type a un accident et se réveille aveugle, avec des pertes de mémoire et surtout la fâcheuse tendance à dire tout haut ce que tout le monde exprime normalement tout bas. C’est un festival José Garcia, un segment vachard, drôle et acide, où l’on rigole bien malgré le contexte. Jusqu’au deuxième film qui commence vite, celui de Béatrice, sa femme qui sort un livre sur sa nouvelle vie. Le bouquin va susciter l’inquiétude et la controverse auprès de sa famille et des copains qui vont tous chercher le moindre indice trahissant leur présence parmi les personnages. Cette partie-là fonctionne comme un jeu de massacre. Pour dire vite, on passe d’une comédie italienne à un drame très français, le règlement de compte entre potes, interrogeant l’autofiction et ses limites. Tous ces personnages souvent incultes, décérébrés ou odieux, sont enfermés dans une maison du Sud-Ouest (toute ressemblance avec Les Petits Mouchoirsde Canet semble fortuite) et nous entraîne dans leur propre jalousie, dépression ou médiocrité. Ce n’est pas vraiment de la satire, ni une réflexion sur les liens d’amitié. Et surtout ça ne chamboule pas grand-chose. Reste le numéro de José Garcia, le mauvais esprit de Lavaine et Alexandra Lamy toujours solaire.
Gaël Golhen

TITO ET LES OISEAUX 
★★☆☆☆
De Gustavo Steinberg, Gabril Bitar et André Catoto

Parabole sur la violence (dont le Brésil est largement victime), ce film d’animation raconte comment un enfant va tenter de sauver son pays d’une épidémie qui touche les gens qui ont peur. Comment ? Grâce à une machine permettant de décrypter les messages des oiseaux, détenteurs, il en est sûr, d’une solution miracle... Un peu trop littérale et fourre-tout, cette fable évoque pêle-mêle le discours médiatique anxiogène, l’idée de transmission (le père du héros est un inventeur idéaliste) et l’utopie écolo. Difficile en outre de cerner à qui elle s’adresse : les enfants de moins de dix ans seront terrorisés, les autres préféreront voir un Marvel. Le talent de ses auteurs réside principalement dans l’ambition graphique du projet, principalement peint à la main et qui dénote un style post-expressionniste convaincant. L’envie de voir leur prochain film est du coup renforcée.
Christophe Narbonne

 

PREMIÈRE N’A PAS AIMÉ

CAPTIVE STATE ★☆☆☆☆
De Rupert Wyatt

Dix ans après que la Terre a été colonisée par les envahisseurs extraterrestres, une poignée de rebelles organise la résistance dans Chicago occupé... Réalisateur assez insaisissable, expert en recyclage (on lui doit le premier volet du reboot de La Planète des singes, le pilote de la série L’Exorciste, un remake du Flambeur...), Rupert Wyatt mixe ici film d’invasion alien et atmosphère young adult. Des jeunes à l’air grave et en sweat à capuche errent dans la ville, espionnés par un super-flic joué par John Goodman. Et les E.T. ? On les voit à peine et c’est un peu le problème. Wyatt, faute d’un budget conséquent, escamote toutes les scènes nécessaires à l’élaboration d’une mythologie crédible. Mais en cherchant à détourner notre attention, il provoque l’effet inverse : on ne voit malheureusement ici que le manque de moyens, et l’absence d’idées pour y pallier.
Frédéric Foubert

 

Et aussi
L’homme à la moto de Agustín Toscano
Kinoa et l’île merveilleusede Jean-Loup Martin
Le renne blancde Erik Blomberg

 

Reprises
L’homme qui rit de Paul Leni