Toutes les critiques de Point limite zéro

Les critiques de la Presse

  1. A voir à lire
    par Virgile Dumez

    Cette œuvre culte souffre tout de même d’une absence d’enjeux scénaristiques forts, de quelques chutes de rythme et d’un contexte post-soixante-huitard très marqué. Cette ressortie sur nos écrans permettra à de nombreux spectateurs amateurs de curiosités cinématographiques de (re)découvrir cette rareté.

  2. Fluctuat

    La fin du monde a déjà eu lieu, la mort du cinéma est de l'histoire ancienne, réjouissons-nous. Enfourchons avec un dernier bras d'honneur nostalgique nos chevaux de fer et misons nos dernières cartouches sur un plein d'essence. Nous voilà déjà à une allure insensée et joyeuse sur la route d'un passé plein d'avenir, bientôt nous atteindrons le Vanishing Point.
    D'où vient Point limite zéro (auquel nous préférerons le titre original : Vanishing Point), cette chose méconnue et pourtant mythique, entourée d'une aura brumeuse ? Elle semble sortir d'un songe, d'un souvenir lointain, d'une époque révolue dont elle serait la métaphore nostalgique. Qui est Richard C. Sarafian, réalisateur oublié ? Comment en 1971, telle une comète traversant l'atmosphère, laissant une trace aussi visible qu'éphémère, ce film a-t-il existé ? Qu'est-ce qui fait qu'aujourd'hui, il produit encore une fascination crépusculaire ? Vanishing Point est beaucoup plus qu'un road movie, qu'un western routier comme Le Convoi de Peckinpah. Devant son spectacle, on est tenté d'enfiler l'uniforme d'archéologue des signes, fouillant, dépistant, décryptant, analysant ses images dans leur contexte. Pour y voir la fin des utopies, nous faire contempler la mort d'un espace ouvert, chanter l'éloge du dernier hors-la-loi ou danser sur les cendres de la liberté. Mais on n'aime pas les uniformes.Vanishing Point, c'est une Dodge Challenger blanche traversant le Colorado et le Nevada et qui finit sa route en Californie. Au volant, un homme, Kowalski, chargé de transporter la voiture à San Francisco. Sans qu'on ne connaisse jamais sa motivation, il veut que la voiture soit à Frisco plus tôt que prévu. Il fonce, se shoote aux amphés, grille toutes les limites. Les polices de chaque état le prennent en chasse et, au fur et à mesure de sa route, des réminiscences évoquent le passé tourmenté du pilote, sans que, jamais, elles ne justifient sa fuite en avant. Parallèlement, Super Soul, le DJ black aveugle d'une station radio, met en musique la course de Kowalski et veut en faire un héros, le dernier symbole de la liberté et des possibles.Vanishing Point est nulle part, à la croisée de tout, des genres, d'une époque, il n'a pas de discours, tout n'est qu'états. La tentation sémiotique s'effrite en miettes, ne laissant que des bribes que chacun recollera à sa façon. Le film est une ligne brisée seulement d'intersections mnésiques ou contextuelles. On y traverse l'Amérique, une époque, des symboles de marginalité, des figures libertaires, mais finalement rien ne tient. Le film nous échappe sans cesse. Sa raison d'être achoppe constamment sur la motivation obscure de Kowalski, sur son geste final et somptueux. Vanishing Point pourrait être romantique, post rock, un film de l'après, nous parlant du lieu de la désillusion. Il est solitaire, téméraire, anarchique, insensé, une pulsion.Ce film de Richard C. Sarafian, contrairement à l'antonionien Macadam à deux voies (signé Monte Hellman et datant de la même année), ne cherche pas à capter le devenir signe d'un espace, sa traversée somnambule, l'éventualité diffuse de la rencontre ou une époque qui se défait. Il serait plutôt existentiel. Sa constante tient à l'ivresse, à l'enchaînement déboussolé et grisant des espaces, au désir d'une vitesse ininterrompue, à son association en musique. Il fait tenir le mirage d'une signification pour mieux en montrer l'état vaporeux et superficiel. Vanishing Point fonce droit, sans but. Il n'est même pas un autre rebel without a cause. Mort du sens, ruines du symbolique, renaissance de la sensation, le film de Sarafian produit bien plus qu'un éclairage rétroactif sur la fin des utopies des années soixante-dix. Vanishing Point est intemporel. Sa seule symbolique tient à ce point de disparition, à ce moment où l'ivresse culmine et où la liberté devient un état séparé du monde, une quête d'impossible absolu.Point limite zéro (Vanishing Point)
    Un film de Richard C. Sarafian
    Etats Unis, 1h38
    Scénario de Guillermo Cabrera Infante (alias Guillermo Cain)
    Avec : Barry Newman, Cleavon Little, Dean Jagger, Victoria Medlin, Paul Koslo.
    Reprise en salles - France: 8 mars 2006[Illustrations : Vanishing point 1971 ]
    Sur Fluctuat :
    Pour poursuivre sur cette route de liberté, lire notre dossier consacré à Monte Hellman, frère d'esprit de Richard C. Sarafian, et à la ressortie de Macadam à deux voies.