Fluctuat
Stardust ne restera qu'une belle promesse. On espérait un grand film d'aventure naïf qui nous plongerait dans un univers merveilleux revisitant la fantasy anglo-saxonne, pas une oeuvre plombée par la faiblesse de ses enjeux narratifs et un ton décalé à la Princess Bride en moins bien.
- Exprimez-vous sur le forum cinémaChez nous et pour beaucoup de spectateurs, Stardust semblera sortir de nulle part. Alors que pour nos amis anglo-saxons, c'est un véritable best-seller que Matthew Vaughn (Layer Cake) a porté à l'écran. Un petit monument de la littérature fantasy contemporaine, signé Neil Gaiman pour le texte et Charles Vess (connu aussi pour ses comics) pour les illustrations. Autant dire que l'adaptation était attendue, mais que chez nous, sinon pour les amateurs du genre, on accueille le film avec une autre curiosité qui nous évitera au moins l'épreuve de la comparaison. Ce qui permet de juger Stardust librement, en tant que film. Et qu'en est-il ? Dès les premières images, on sent, sans connaître une ligne du roman, que quelque chose précède au film. Non pas qu'un passé qu'il faudrait connaître n'est pas raconté car tout est très clair du début à la fin. C'est plutôt la construction du récit, son introduction et son évolution, qui quoique conventionnelle et lisible, repose sur une trop grande conscience pré-établie des enjeux narratifs et des personnages. On ne se perd jamais, d'autant que l'ensemble est peu complexe, mais Vaughn peine à imposer son univers pour ceux qui n'en seraient pas familiers.En fait les problèmes de Stardust sont multiples. D'abord, en empruntant son imaginaire aux classiques de la fantasy, il se cantonne à un univers bourré de références qu'il ne renouvelle que très peu. C'était sans doute le cas du livre, il n'y a donc pas de raison que ça ne soit pas celui du film, certes. Mais après des années de revival magie et sorcier avec Harry Potter, et après l'adaptation du Le Seigneur des Anneaux, la fantasy au cinéma a placé la barre très haute, quoiqu'on pense des films en question. Il fallait donc à Stardust quelque chose de plus, au-delà d'être une adaptation d'un succès en librairie. Sauf que l'histoire de ce jeune candide (Charlie Cox) qui en partant chercher un morceau d'étoile pour sa belle pénètre dans un royaume magique où il rencontre l'amour et finit sacré roi, elle est bien jolie, pleine d'un esprit d'aventure qui revisite les contes de fées avec une naïveté pas désagréable, mais il lui manque l'étoffe du romanesque, un souffle épique original. Vaughn peut bien déployer des efforts avec ses effets spéciaux pour faire voler un bateau avec robert De Niro en capitaine de vaisseau, ou donner des pouvoirs à Michelle Pfeiffer, transformée en sorcière, ça n'impressionne pas. D'autant que l'intrigue en forme de course poursuite avance lentement (c'est long) et sans se renouveler réellement.Autre détail, le héros de Stardust. Personnage lisse et pur au début, il vit son aventure comme une quête initiatique qui le fait grandir. Mais, choix de Charlie Cox ou pas, il est aussi insignifiant à la fin qu'au début. Normal, chaque personnage est unilatéral, c'est presque une convention du genre. Soit, mais lorsque les personnages sont menés par l'action et que l'action est inintéressante parce que la trajectoire des personnages est nulle, on a comme un problème insoluble. On peut penser que l'acteur est mal choisi, mais c'est encore pire pour les autres : Claire Danes est horrible, pénible, laide, la transformer en étoile (humaine) symbole d'amour et pureté est franchement pas crédible ; De Niro en pirate travelo, on pousse un soupir ; et Pfeiffer en sorcière hystérique, elle avait déjà fait le coup, on est en terrain connu. On a donc du mal à tenir quelque chose. Même le seul truc que le film peut avoir pour se distinguer, un certain humour au second degré (par ailleurs assez neuneu), Rob Reiner l'avait inventé vingt ans plus tôt avec Princess Bride, qui était plus inspiré et réussissait surtout à mélanger le conte et la comédie, sans le moindre effet visuel, la seule chose qui singularise Stardust, car on peut reconnaître que c'est plutôt joli. Mais soyons clair, ce qui nous gêne dans Stardust, ce n'est pas sa superficialité ou pas tant qu'il pille les classiques, c'est qu'il échoue justement dans cette logique, à devenir un pur cinéma-BD jouant sur le déploiement de son univers et des archétypes. Il y a encore les traces d'un beau cinéma naïf qui l'éloigne des produits calibrés du genre, notamment par son ton, mais pour l'essentiel, la promesse d'une aventure incroyable et excitante dans un monde fabuleux, on passe plutôt à côté. Stardust, le mystère de l'étoile
De Matthew Vaughn
Avec Robert De Niro, Charlie Cox, Claire Danes, Michelle Pfeiffer
Sortie en salles le 24 octobre 2007Illus. © Paramount Pictures France
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