Affiches Films à l'affiche mercredi 21 février 2024
Haut et Court/ KMBO/ ARP

Ce qu’il faut voir en salles

L’ÉVÉNEMENT
LE SUCCESSEUR ★★★☆☆

De Xavier Legrand

L’essentiel

Nouveau film de Xavier Legrand après le triomphal Jusqu’à la garde, ce thriller sur la toxicité post-mortem d’un père parvient à tétaniser avec irrégularité.
 

Après Jusqu’à la garde, Xavier Legrand revient avec un deuxième long qui montre cette fois comment le patriarcat exerce aussi une brutalité sur les hommes adultes. Pour cela, il raconte l’histoire du jeune et angoissé directeur artistique d’une maison de Haute Couture française qui a coupé depuis longtemps les liens avec son Québec natal mais que le soudain décès de son père oblige à retourner au Québec pour s’occuper de la succession, où il va alors faire une atroce découverte au sujet de son géniteur. Adoptant à nouveau le genre du thriller psychologique, le cinéaste réussit une captivante première partie où le créateur de mode joué par Marc-André Grondin vit le retour à ses origines comme une étouffante corvée. Pourtant, quand le récit vire ouvertement à la tragédie grecque, la volonté de filmer longuement la stupéfaction du personnage vient étrangement freiner la tension. La mise en scène de Legrand rehausse heureusement les quinze dernières minutes, où une puissante émotion nous saisit pour rendre au final terrifiant ce conte sur la difficulté à se libérer du poids des pères.

Damien Leblanc

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PREMIÈRE A ADORE

LE ROYAUME DES ABYSSES ★★★★★

De Tian Xiaopeng

Un film d’animation complètement psychédélique, affolant visuellement, qui vous retourne le cerveau Voilà ce qu’on ressent devant ces aventures d’une jeune fille tombée par-dessus bord pendant une tempête lors d’une croisière en mer avec ses parents, et qui devra travailler au service d’un cuisinier complètement fantasque, dans un restaurant-bateau peuplé d’animaux bizarres. Le film de Tian Xiaopeng vous emporte par sa folie visuelle et sitôt passé le prologue animé de façon photoréaliste, le grand huit se déclenche pour de bon et la course ne ralentira à peine que le temps de son épilogue, réellement bouleversant. Un sommet du genre

Sylvestre Picard

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PREMIÈRE A BEAUCOUP AIME

LE PION DU GENERAL ★★★★☆

De Makbul Mubarak

Dans une petite ville indonésienne, le jeune Rakib travaille comme employé de maison dans le manoir d’un général à la retraite en pleine campagne pour les municipales. Alors que l’ex militaire prend le garçon sous son aile, sa figure paternelle devient étouffante et menaçante, jusqu’à l’écraser et l’objectifier. Le Pion du général apporte un vent de fraîcheur dans le paysage du cinéma indonésien à travers un thriller intense qui maitrise parfaitement ses codes. La relation entre l’ado et l’homme aveuglé par ses gloires passées tisse une tension sourde dans la demeure isolée et entourée par l’humidité et le brouillard. En capturant la lumière naturelle dans de longs jeux de reflets et d’angles de caméra, ce premier long traite de la tragédie qui plane sur ses personnages à travers les rapports de force socio-politiques et le pouvoir de séduction qu’ils entrainent. La révélation d’un cinéaste.

Bastien Assié

 

PREMIÈRE A AIME

L’EMPIRE ★★★☆☆

De Bruno Dumont

« Gare aux héros et aux saints ! », prévient Belzébuth incarné par un Fabrice Luchini halluciné, seul dans un vaisseau spatial cathédrale prêt à amender une humanité primitive. Le périmètre à conquérir est fait de dunes, de champs de patates, d’une mer infinie... Le Nord de Dumont, son territoire. Le cinéaste en parfait misanthrope poursuit sa croisade où le « mal triomphe par la force des choses » puisque « les humains sont nuls ».  Le plus déstabilisant avec cet Empire est ce complet nihilisme où le geste de Dumont semble détaché des sentiments, ceux-là même qui par une empathie fusse-t-elle malsaine, nous faisaient vibrer dans ces films précédents. Le bordel n’est ici ni joyeux ni généreux. Le naturalisme perverti produit certes un trouble mais qui se referme peu à peu sur lui-même. Où est-on ? Pourquoi ? Dumont est ailleurs. Suivons-le. Ou pas.

Thomas Baurez

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SLEEP ★★★☆☆

De Jason Yu

Un couple, un appartement, un bébé en chemin, et le train-train quotidien qui part soudain en vrilles parano… Contrairement aux apparences, nous ne sommes pas dans Rosemary’s baby, mais dans Sleep, premier long du coréen Jason Yu. Ça commence comme une comédie, par l’observation tendrement ironique de ce jeune couple sur le point d’avoir un enfant, et dont la gentille existence va bientôt être chamboulée par le somnambulisme de monsieur. Le comportement nocturne de celui-ci se révèle de plus en plus inquiétant : il se gratte la joue jusqu’au sang, manque de se jeter par la fenêtre… Ancien assistant de Bong Joon-ho, Jason Yu est clairement allé à bonne école et trouve le juste équilibre entre frissons fantastiques et observation socio. Le film s’appelle Sleep mais impossible de piquer du nez devant.

Frédéric Foubert

WALK UP ★★★☆☆

De Hong Sang- soo

Alors que le dernier film d’Hong Sang-soo (De nos jours) était sorti à l’été 2023, que le prochain sortira en juin et qu’un autre est présenté à la Berlinale ce mois, le plus prolifique des cinéastes sud-coréens sort donc Walk Up, où un célèbre réalisateur (joué par le fidèle Kwon Hae-hyo) rend visite à une ancienne amie dans l’immeuble de Gangnam dont elle est propriétaire. C’est l’occasion d’une exploration de chaque étage du bâtiment et de rencontres avec les différentes personnes qui peuplent le lieu. Au-delà de l’image en noir et blanc et des amusantes séquences de discussions, le réalisateur réussit miraculeusement à créer du trouble avec cette douce rêverie où les frontières temporelles s’abolissent et où amours et fantasmes se mêlent pour former un portrait mélancolique, plus ou moins autobiographique, d’un artiste d’âge mûr qui continue à découvrir les mystères du désir et les joies du lâcher-prise.

Damien Leblanc

BYE BYE TIBERIADE ★★★☆☆

De Lina Soualem

Arrière-petite-fille d’une longue lignée de femmes palestinienne, Lina Soualem est la première de sa famille à être née loin de Tibériade, enclave palestinienne à la frontière du Liban et de la Syrie. Cet éloignement, elle le doit à sa mère, Hiam Abbass, partie du pays très jeune pour devenir actrice à Paris. C’est à cette dernière que s’intéresse ce documentaire émouvant dans lequel Lina Soualem retrace, grâce à de très belles images d’archives, l’histoire familiale. Hiam se confie face caméra sur sa jeunesse vécue sans théâtre ni cinéma, mais aussi sur les bouleversements politiques qui ont ébranlé la vie de la famille (dès 1948, plusieurs membres sont chassés de leurs maisons par les Israéliens tandis que d’autres villages palestiniens sont colonisés ou rasés de la carte). Lina Soualem désobéit ici au mantra de sa mère, «ne pas ouvrir pas les douleurs du passé», pour délivrer une mémoire aussi poétique que politique.

Emma Poesy

UNIVERSAL THEORY ★★★☆☆

De Timm Kröger

Christopher Nolan fait des émules jusque dans les Alpes suisses. C’est là que l’Allemand Timm Kröger a situé l’intrigue de son thriller fantastique évoquant sciences physiques, mondes parallèles et citations de Robert Oppenheimer, et confirmant l’existence d’une internationale du cinéma « quantique », sous influence du réalisateur d’Interstellar. Universal Theory se déroule au début des années 60, en haute altitude (le film lui-même est assez perché), lors d’un congrès scientifique au cours duquel un jeune chercheur va mettre à l’épreuve ses hypothèses sur le multivers... Brassant les références (La Jetée, Resnais, le film noir US...), le film dévoile ses mystères à un rythme un peu trop languissant, mais emporte le morceau dans un dernier acte où le romantisme de Kröger, sa malice pop, son travail plastique sur les distorsions spatio-temporelles finissent par réellement envoûter

Frédéric Foubert

IL FAIT NUIT EN AMERIQUE ★★★☆☆

De Ana Vaz

Chaque jour à Brasilia, la police est appelée par des habitants qui découvrent près de chez eux un animal sauvage échappé du parc national. «Pouvez-vous venir récupérer cette bestiole?», les entend-on souffler dans le combiné tandis que se multiplient à l’écran les plans nocturnes de tamanduas, loups à crinière, renard des savanes… Porté par sa photographie somptueuse, ce documentaire restitue avec beaucoup de grâce les tensions entre une urbanisation devenue folle et la faune silencieuse qui perd, peu à peu, son droit de cité.

Emma Poesy

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME

UNE VIE ★★☆☆☆

De James Hawes

Surnommé le Schindler britannique, Nicholas Winton a sauvé des centaines d’enfants juifs vivant à Prague en organisant des convois vers Londres, avant que la ville tombe aux mains des Nazis, en 1938. Un geste resté méconnu jusqu’à ce soir de 1988 où la BBC l’a invité à témoigner en réunissant à ses côtés ceux qui avaient survécu grâce à lui. James Hawes raconte cette histoire en multipliant les aller- retour entre les deux époques. La faiblesse de la mise en scène de la partie des années 30, le recours à une pénible musique lacrymale laissent à penser qu’un documentaire aurait été une forme plus appropriée. Mais cette option nous aurait privé d’Anthony Hopkins qui incarne Winton dans les années 80. Chaque seconde de sa présence à l’écran est tout à la fois un régal, une merveille de précision, un sommet d’émotion contenue qui explose ici et là de manière déchirante. Mais ne suffit pas à tout sauver.

Thierry Cheze

LES DERNIERS HOMMES ★★☆☆☆

De David Oelhoffen

Né d’une rencontre entre Jacques Perrin (légendaire acteur, réalisateur et producteur disparu en 2022) et David Oelhoffen (réalisateur de Loin des hommes ou Frères ennemis), ce film de guerre situé en 1945 en Indochine suit un groupe de légionnaires étrangers traqués par l’armée japonaise qui tentent de survivre dans la jungle pour rejoindre la base alliée la plus proche. Oelhoffen y décrit l’enfer vécu par des hommes se battant de façon absurde pour les miettes de l’empire colonial français et transforme ce récit historique en fresque irrationnelle où les légionnaires ressemblent à des fantômes à la lisère de la folie. Si un parfum d’Apocalypse Now flotte dans l’air, le voyage se heurte pourtant à une sorte d’automatisme. Car les personnages, formant une troupe homogène et spectrale, ne sont pas suffisamment caractérisés pour retenir l’attention et captiver, ce qui finit par rendre ce drame dévitalisé.

Damien Leblanc

AU FIL DES SAISONS ★★☆☆☆

De Hanna Ladoul et Marco La Via

On a découvert le duo Hanna Ladoul- Marco La Via avec Nous les coyotes, un premier long sur un jeune couple confronté au rêve américain. A rebours de la majorité de la critique, Première n’avait pas été convaincu par ce film charmant mais peinant à tenir sur la longueur.  Soit exactement ce qu’on éprouve devant cette chronique d’une relation grand- mère- mère- fille – que tout semble opposer avant de se rapprocher - au sein d’une ferme où elles élèvent des poules. Le trio Catherine Deneuve- Andrea Riseborough- Morgan Saylor y est impeccable mais empêtré dans ce récit cousu de fil blanc.

Thierry Cheze

 

PREMIÈRE N’A PAS AIME

DOUBLE FOYER ★☆☆☆☆

De Claire Vassé

Un couple qui a décidé de ne pas vivre ensemble mais dans deux appartements séparés suscite l’incompréhension de leurs proches au point de remettre en cause le lien fort qui les unit. Difficile de se passionner pour un récit dont on ne croit à aucun des rebondissements tant les enjeux apparaissent minces. Pour en faire le sujet de son premier long, l’autrice-journaliste Claire Vassé doit forcément être certaine du contraire. Mais elle ne parvient jamais à le transmettre.

Thierry Cheze

 

Et aussi

Les Chèvres ! de Fred Cavayé

Les reprises

Le Nom de la rose de Jean- Jacques Annaud

Une histoire vraie de David Lynch